Comme à ses habitudes, le scientifique sortait faire un tour pour se fumer une petite cigarette afin de décompresser de sa matinée catastrophique. Il en avait plus que marre de toujours faire la même chose sur les cobayes, il voulait du nouveau ! Marre de faire des expériences sur autrui ; toujours la même rengaine, c’est-à-dire d’enlever un « don » ou bien d’en rajouter, ou bien de créer un être mi-homme mi bête. Malheureusement, la science connait des échecs et le pourcentage de réussite ne volait guère haut. D’ailleurs, lui et son équipe se faisait souvent réprimander par le Gouvernement car ils n’allaient pas à assez vite à leur goût. Non pas que je le défends mais… La science, c’est long ! Surtout qu’en plus, Nathanaël ne connaissait pas encore le corps humain comme sa poche. Le jeune homme ne cessait de passer des soirées interminables dans la bibliothèque de Shiinu afin d’approfondir son vocabulaire et ses pratiques en médecine. Cela faisait bien trois nuits consécutives qu’il passait sur un chapitre ! Il ne progressait pas parce que ce n’était pas de son domaine. Il avait horreur de la médecine. L’étude des comportements, la pure science l’intéressait ! Tiens, d’ailleurs, ce n’était pas le moment pour les élèves de passer du temps dehors, se détendre de leur interminable matinée ? Les élèves de cette pension devaient en avoir marre eux aussi d’être enfermés constamment dans ce bâtiment alors qu’il faisait un temps magnifique dehors ! Allez hop, il ne devait en aucun cas manquer cette chance de pouvoir pratiquer ce qu’il connaissait par cœur !

Cigarette en bouche, mains dans les poches de sa blouse blanche bien propre, Nath’ décida de quitter, pendant un petit moment, ses collègues pour se rafraichir les idées. Un bloc note était collé contre son corps, entre son bras faisant appuie dessus et des stylos trônaient fièrement dans la poche avant de sa blouse, au niveau de son sein gauche. Il marcha dans les couloirs de la pension, le regard porté en avant et fier, rencontrant sur son passage des collègues et la Police mais il s’en fichait de ces derniers. Il avait un badge portant son nom et son statut ici, il ne craignait rien. Mais Nath’ ne les aimait pas, préférant ne pas être trop proche de leurs affaires. Au fait, il ne savait pas vraiment ce qu’ils faisaient mais c’était comme ça, il ne les aimait pas. Une fois le couloir traversé, il descendit les escaliers de l’hôpital pour se rendre dans le hall et ainsi quitter le lieu de son travail. Le soleil frappait très fort, il devait être genre midi, donc l’heure de manger. Le temps qu’il se rende jusqu’au pensionnat, les élèves auront déjà terminé de manger et n’auront sûrement pas encore repris les cours. Tant pis s’il rentrera en retard pour une réunion de pacotille. De toute façon, c’était à l’autre équipe de bosser cette aprèm’. Les autres lui feront un résumé.

« Allez zou » murmura-t-il à soi-même.

Nathanaël sortit de l’hôpital pour se diriger vers la pension de Shiinu. A pied, il ira. Cela lui fera du bien de marcher et de prendre l’air car il passait ses journées cloitré dans cet établissement. Sa cigarette se consuma doucement et le moment de la jeter arriva. Il l’écrasa sous la plante de ses chaussures et la remit dans son paquet. Il lui en restait encore cinq. Ca devrait suffire pour la fin de la semaine. Sauf si le travail le stress encore et là il devra en consommer plus qu’à l’accoutumée. Sur ces belles pensées, le jeune homme traversa différentes rues, il connaissait très bien le chemin puisque cela faisait un moment –peut-être depuis le début- qu’il venait à la pension pour étudier les élèves et leurs comportements face au Gouvernement. Bien qu’il approuve certaines règles, Nathanaël en détestait certaines. Même s’il travaillait pour le Gouvernement, qu’il était logé, nourrit et tout le tralala, il n’appréciait guère les actes qu’il encourait. A final, il ne connaissait pas grand-chose d’eux puisqu’il n’avait guère eu le temps de se renseigner avant, lorsqu’il n’était qu’un jeune diplômé. Lorsque le jeune homme aux cheveux verts traversa une nouvelle rue, il tomba alors sur la pension Shiinu, anciennement majestueuse.

La Guerre avait fait beaucoup de victimes et de dégâts. L’ancien Paradis ne ressemblait plus à rien. C’était comme un camp, c’était tout simplement répugnant. Mais Nath’ n’avait pas à se plaindre, il n’était pas tout en bas de l’échelle, mais plutôt bien placé malgré le fait qu’il ne pouvait pas plaider pour une cause. Son job consistait à exécuter les ordres du Gouvernement. Il se taira la dessus et continuera de bosser pour eux, comme il l’a toujours fait jusque là. Se taire et obéir. Haussant les épaules, Nathanaël se décida à rentrer dans la pension. Heureusement, il connaissait bien les gens de l’administration et puis, pour son travail, il devait se rendre dans ces lieux. Pour ses recherches, pour les approfondir, il devait étudier des élèves contraints à des expériences ou pas. Il les observait de loin, notant tous les gestes qu’ils pouvaient produire sur une heure, comprendre comment ils réagissaient face à ses congénères ou bien des êtres « normaux ». Car finalement, personne n’est normal en ce monde. Surtout ici. Nath’ retroussa ses manches au niveau de ses coudes et rentra dans le bâtiment. D’habitude, il se dirigeait vers les classes pour discuter avec les professeurs et avoir de plus amples informations mais là, il voulait changeait. Ses pas le menèrent vers la cours de récréation. Evidemment, le lieu où tous les élèves se réunissaient pour parler ou bien se détendre. Le meilleur moyen d’avoir de bonnes sources. C’est donc vers cette cour que Nathanaël décida de se rendre.

Cette cour était tout à fait normale ; comme une cour de récréation pour les primaires, elle était faite de la même manière. Terrain de foot, un terrain de basket… Cependant, chose étrange, au lieu que ce soit du goudron sur le sol, c’était du sable. Nathanaël entra dans la cour et mit son bloc note de façon à prendre des notes plus facilement. Il y avait du monde certes mais étrangement, son stylo ne bougea pas. Sa main resta figée.

« Et merde… »

Le scientifique redressa sa tête et soupira longuement. Il ne trouva pas l’inspiration et l’envie de le faire. Etrangement, il n’avait pas envie de bosser. Le jeune homme en avait marre, il voulait lui aussi prendre du bon temps. Et puis revoir tous ces jeunes, lui rappelait son ancienne jeunesse. Il alla s’assoir sur un banc, à l’écart de la cour sous un arbre et se remémora son ancienne identité. Celle avait qu’il ne devienne celui qu’il est. Coudes sur les cuisses, mains sur chaque joue, Nath’ regarda les élèves s’amuser ou bien en train discuter. Son bloc note était à côté de lui, les pages vierges dansaient avec la brise légère qui venait de s’installer. Oui, il faisait agréablement bon et l’envie de travailler s’était envolée…