Mission Spéciale ; Suite [Pv Meï ♥]

Alessia tenta de garder une entière maîtrise d'elle-même alors que son ancienne amie venait de s'incliner devant elle. Alors c'était à ça qu'elle était réduite maintenant ? Plier devant des stupides humains sans cœurs qui ne valaient pas le quart de ce qu'elle était ? Suki aurait trouvé la situation triste si elle n'avait pas été en premier lieu dégoûtée. Elle se jura qu'un jour, elle tuerait de ses propres mains les ordures qui infligeaient jours après jours tant de souffrances aux cobayes et aux espèces modifiées. Il est vrai que, si elle se mettait à tuer sans remords, alors on pourrait dire qu'elle n'était finalement pas mieux qu'eux. Mais Suki ne cherchait pas à être un modèle de vie, non, elle cherchait la vengeance. Et elle l'aurait.

Puis, comme si elle n'en avait pas déjà fait assez, "Meï-K" lui adressa poliment ;

Bonjour mademoiselle, c'est un honneur de travailler avec vous.

Le regard d'Alessia resta bloqué quelques instants sur la jeune androïde qui la surprenait de plus en plus. Elle semblait réellement avoir été lobotomisée, et pour la première fois, "lobotomisée" n'était pas un terme employé à la rigolade. Sukinette reprit ses esprits lorsque le colonel Hellins interrompit cette discussion muette pour déclarer avec sa perfidie habituelle ;

A vrai dire mademoiselle, cette mission est un spéciale. Certes, vous effectuerez une patrouille dans la quartier commercial, mais avant je souhaite impérativement que vous passiez par le parc du Cerisier, un petit parc urbain tout près de l'Eglise. On m'a signalé des agissements rebels dans le coin.

Il était rare que les itinéraires de patrouille soient modifiés au dernier moment, comme celui ci. Généralement, on donnait une mission à un chef de patrouille, le chef de patrouille exécutait la mission, puis rendait son rapport. L'ensemble restait très officiel. Cependant, Suki n'y releva rien de très inquiétant, elle se contenta d'acquiescer. Elle aurait d'ailleurs eu du mal à protester, le colonel les mettait déjà dehors, accompagnées d'un « Je veux un rapport d'ici 3 heures. Allez, dépêchez vous. ». Suki détestait sa manière de se prendre pour leur maître, de les traiter comme des chiens. Encore un qu'elle se plairait à faire disparaître - le moment venu, bien évidemment.

Les deux jeunes femmes se mirent donc en route, empruntant les escaliers menant à une partie du bâtiment réservée aux élèves. Elle avait toujours mal au cœur en passant devant les salles de classe où le nouveau régime avait effacé toute joie d'apprendre. Pourtant, aujourd'hui, elle ne jeta qu'un coup d’œil distrait aux élèves. Elle était comme troublée. Pouvait-elle vraiment effectuer sa patrouille comme si de rien n'était, alors qu'elle se trouvait en compagnie d'une vieille amie ? Certes, l'amie en question n'avait sans doute aucun souvenir d'elle, mais elle restait une amie. Était-elle seulement capable de le faire sans se trahir ? Il faut l'avouer, bien qu'étant une bonne espionne, Aless n'était pas faite de pierre. Il était probable que ses sentiments prennent le dessus, dans ce genre de situation ô combien complexe. Elle jeta un très rapide coup d’œil à sa partenaire du jour. Elle avait un air purement neutre qui déstabilisait Suki... Elle ne pouvait décidément pas rester indifférente. Peut-être y avait-il un moyen de la ramener à la réalité ? A la réelle réalité, si je puis dire. Elle avait peu-être trop d'espoir, mais Suki pouvait tout de même tenter le coup, non ? Elle pouvait essayer de remémorer à Meïko des moments qu'elles avaient passé ensemble, des proches de la jolie rousse... Et si ça ne marchait pas ? Alessia se verrait démasquée, et sa tête serait, comme nombre de rebels, mise à prix. Cela voudrait dire, prendre le risque de cramer sa couverture. Mais pas la peine d'y réfléchir à deux fois, Meïko en valait largement la peine.

A présent, les deux jeunes femmes étaient en route pour la ville. Mais leur destination n'était plus le parc du Cerisier. Suki savait parfaitement où elle allait emmener Meïko. Un lieu débordant de souvenirs. Un lieu où les gens venaient exprimer leur émotions en étalant leur mémoire. Un lieu où, malheureusement, résidaient beaucoup de rebelles. Le cimetière, tout simplement. Elle espérait que l'humaine robotisée parfaitement disciplinée ne remarquerait pas le changement d'itinéraire. Enfin, espérer qu'elle ne le remarque pas serait incensé, elle espérait cependant qu'elle ne poserai pas de questions et suivrai bien sagement Alessia, lui facilitant ainsi la tâche. Même si Meï-K remarquait qu'Alessia déviait de la mission, vu la manière dont elle se comportait avec cette dernière, il y avait peu de chances pour qu'elle se rebelle soudainement. Dans le pire des cas, si Meï la questionnait, Suki n'aurait qu'à inventer un petit bobard à propos d'un raccourci, ou quoi que ce soit de la sorte.

Elle avait trois heures.